La Touraine est une terre calme, dans l’ensemble, vouée aux petites exploitations agricoles. Mais, très longtemps, la terre n’a pas appartenu à celui qui la travaillait car, de son prestigieux passé de terre royale (1422-1589), elle en avait conservé le découpage territorial en terres seigneuriales.
En effet, les grandes familles nobles ou bourgeoises, qui gravitaient autour du pouvoir royal et qui souvent le servaient, se sont constitué, dans un désir souvent effréné d’imitation, des patrimoines fonciers de grande importance, ornés de demeures de prestige.
Si la maison traditionnelle n’a guère évolué, offrant toujours aux rayons du soleil la chaleur de son tuffeau, la demeure seigneuriale, elle, a suivi la marche du temps.
Si au XVème siècle, l’image du château fort flanqué de nombreuses tours, symboles du pouvoir, reste très présente, l’espace s’élargit, le logis s’étend et les dispositifs défensifs s’atténuent.
Une nouvelle façon de penser l’habitat seigneurial, tourné vers le confort et l’esthétique, entraîne la création de larges ouvertures sur l’extérieur et le développement d’un riche décor inspiré de la renaissance Italienne.
Mais l’esprit français, qui n’est jamais bien loin, va jouer un subtil jeu polychrome en utilisant la pierre et la brique.
Puis les Rois de France quittent la Touraine et centralisent leurs activités sur l’Île-de-France, suivis par leurs grands serviteurs qui conservent néanmoins leurs propriétés tourangelles. C’est ainsi que le style classique va s’imposer dans notre province et la décorer d’imposantes constructions symétriques et rigoureuses.
En parallèle, chaque propriétaire terrien prend soin de son domaine et cherche toujours à restaurer, embellir et agrandir son logis même s’il n’y passe que peu de temps car il habite en ville, et profite peu de sa ou ses « feuillées » ou plutôt « folies ». Le XVIIIème siècle verra se multiplier partout ces belles demeures, souvent érigées par des architectes renommés.
C’est pourquoi, on désigne communément ces bâtisses comme des « petits châteaux ».
Suivant en cela l’évolution de l’architecture, ils ont subi au cours des siècles de nombreuses modifications qui ont radicalement changé leurs aspects d’origine.
Mais c’est pendant la seconde moitié du XIXème siècle qu’une véritable frénésie de constructions et de restaurations, quelquefois hasardeuses, s’emparent des riches de ce monde et les styles « néo » gothique, renaissance, classique etc. fleurissent, soit depuis le néant, soit tout simplement en abattant l’existant et en construisant ce qui est désormais à la mode.
Catherine BAS-DUSSEAULX, CGDT 139, septembre 2021